CORSE MATIN - 7 mai 2003

Incidents et sabotages sur la ligne CFC de Calvi

Les cheminots dénoncent des actes de malveillance à répétition. Ils s'insurgent d'autre part contre l'état du « matériel de récupération » en service sur le réseau ferré desservant la Balagne

Une série de pannes techniques et d'incidents majeurs, dont l'origine « reste à déterminer » et des actes de sabotage, se sont produits ces derniers jours en gare de Calvi et sur la ligne régulière Calvi- Bastia.

Un wagon qui se « décroche » à Palasca ; un départ d'incendie dans la machine à Novella et l'autorail ABH assurant la navette avec l'Ile-Rousse, plusieurs fois en panne au départ de Calvi.

A l'origine de l'une de ces pannes, un tuyau de gas-oil « sectionné » et pour compléter le tableau, des exactions qui, au dépôt non gardé de la gare, se répètent la nuit. Dernière en date, dans la nuit de samedi à dimanche, de l'huile de vidange y a été répandue sur le sol.

Début d'incendie et rupture d'attelage

Pour Antoine Canava, chef de la zone Calvi-L'Ile-Rousse-Ponte-Leccia et responsable du service commercial et exploitation, « hormis l'incendie qui relève ou d'un incident technique ou d'un problème de maintenance, il s'agit d'actes délibérés de malveillance ».

Il y a une semaine, seule la vigilance des cheminots a permis d'éviter la catastrophe : le moteur du train régulier (Calvi-Bastia), bondé de passagers, a pris feu.

Ludovic Poletti, conducteur, et Christophe Canava, contrôleur, ont pu circonscrire l'incendie dès son départ. « Nous avons eu beaucoup de chance », disent-ils.

Quelques jours après à Palasca, Alain Lorenzini, conducteur, et Christophe Visani ont été confrontés à une rupture d'attelage. La goupille avait été cisaillée par une main criminelle. En clair la remorque, avec des passagers à bord s'est détachée du Wagon. Fort heureusement, sur ce secteur, la vitesse de la machine était très ralentie.

En trois ans, deux autres autorails ont brûlé. Défaillance d'entretien ou défaut de conception ? « Il n'y a jamais eu de conclusion d'enquête », se borne-t-on à déplorer.

« Une enquête doit être diligentée »

Toute la question est aujourd'hui de savoir si la direction va diligenter une enquête. « Si elle ne le fait pas, il existe, indique Alex Lorenzini (agent de mouvement) délégué syndical CGT, des pouvoirs judiciaires dont c'est le rôle. »

Alors que de grands travaux de modernisation sont prévus ailleurs, les cheminots dénoncent le fait que depuis 1998 « aucun investissement n'a été réalisé en Balagne pour améliorer ou simplement entretenir les infrastructures et le matériel ».

« Nous sommes, disent-ils, la dernière roue de la charrette. Nous récupérons toujours le vieux matériel et dans le cadre du PEI aucun km de voie n'est prévu. Vous imaginez qu'entre Novella et Ponte-Leccia aucune traverse n'a été installée... »

La conjugaison de tous ces éléments contribue à accentuer un climat social très malsain.

La direction de la SNCF et le Comité d'entreprise du Chemin de fer corse (CFC) ont été interpellés (voir ci-dessous) sur la question de savoir quelle suite sera donnée à cette affaire dont le caractère de gravité n'échappera à personne.

Souvent en panne ou objet de sabotage au départ de Calvi, la micheline est empruntée chaque jour par des centaines de vacanciers.


Le risque de faire des victimes

François Morabito, secrétaire du syndicat CGT des cheminots de la Corse, accompagnés de Dominique Silvestri, secrétaire du comité d'entreprise du CFC (Chemin de fer de la Corse), était, lundi, en Balagne où il a réagi avec gravité.

« Il y a une semaine, a-t-il déclaré, grâce à la vigilance des cheminots on a évité la catastrophe. Nous avons une obligation de réserve, mais si ces actes de malveillance perdurent, nous estimons qu'ils pourraient faire des victimes parmi le personnel et les usagers. Nous sommes soucieux des conditions de travail anormales dans lesquelles les cheminots assurent leur service et c'est notre devoir de tirer la sonnette d'alarme. En l'état, et faute d'en savoir plus, c'est notre position ».

Et d'interroger : « Nous ne comprenons pas - cela n'engage que la responsabilité du syndicat CGT - que la direction n'ait pas déposé une plainte contre X. Peut-être y a-t-il d'autres initiatives, mais nous ne les connaissons pas ».

« La SNCF doit tenir ses engagements »

« Nous vivons un paradoxe : malgré un renforcement de la direction depuis six mois, les problèmes se multiplient. Or, il n'y a aucun rapprochement à faire avec les cheminots qui sont à leur poste de travail », poursuit François Morabito.

Puis, le responsable syndical conclut par un constat : « Nous ne disposons pas des conditions normales d'un service public. La SNCF qui est l'exploitant du réseau - par convention avec la CTC - doit apporter en Corse un savoir faire qu'elle met en application sur le continent. Elle doit respecter ses engagements et assurer une démarche de qualité, qui doit se traduire par des trains bien entretenus ».

R. A.

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